Mademoiselle Spleen

Elle s'installe tranquillement sur le rebord de la fenêtre et lui jette un regard complice. 
Elle le surprend toujours lorsqu'elle surgit de nulle part.
Il l'avait connue un soir d'été, une de ces rencontres inattendues, en terrasse d'un bar oublié.      
C'est elle qui l'avait rejoint et qui s'était invitée à sa table. Ils avaient pris un verre, puis deux, puis trop… Il lui avait confié ses manques, ses regrets, ses ratés. Celles qu’il avait aimées, la maladie de sa mère, une sœur folle à lier, les oiseaux moqueurs et le vide à ses pieds. Attendrie et patiente, elle l’avait enveloppée, pris sur sa poitrine, elle l’avait réchauffé. Sans poser de questions, elle essuyait ses larmes, buvait ses mots charbon. Il se coulait en elle, noyait sa déraison.  Elle était toujours là, de l’aube à la nuit blanche, dormait tout contre lui, frissonnant sur ses hanches. Parfois il la quittait, une escapade en douce, le temps d’une brève histoire, un sursaut dans sa course. Mais il revient toujours dans ses bras rassurants, elle guette tous ses faux-pas et pointe ses faux-semblants. Quand il sent qu’elle approche, il aimerait la tuer, l’étouffer au réveil, la clouer au parquet,  faire taire sa voix mielleuse... un dard dans son cortex. Mais toutes ses forces le quittent, quand sur son lit défait, il regarde la bouteille, le verre et les cachets, qu’elle a déposés là, en amante dévouée.

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